té 1994, Paolo Roversi, assisté du dear doux David Lasnet, travaillait en nocturne sur la série "Gaultier - Paris". Il avait une bonne semaine de retard sur le planning et le labo Granon fermant fin juillet, je décidai de retarder mon départ en vacances pour assurer la bonne fin du travail. Tous les jours, j'assistai l'équipe sur les prises de vues, repartais dans la nuit avec les films, le lendemain les développais et faisais les planches-contact, puis j’allais retrouver l’équipe au studio Luce en fin après-midi pour repartir en vadrouille. Ce faisant, je me liai aussi d’amitié avec le fils Roversi, Filippo, récemment revenu de New-York où, très inspiré par le guitariste Stevie Ray Vaughan, il avait tenté l’aventure des clubs de blues. Sa passion suivante fut la guitare classique... Très calme, appliqué et impliqué professionnellement, il devint bientôt tireur exclusif de son père (d’abord traditionnel puis numérique), parfois photographe de déco pour sa mère, Patrizia, et mon client quand il lui fallait des tirages couleurs ! Travaillant tous deux dans le quatorzième, nous nous retrouvions régulièrement pour de brefs moments agréables. Mais dans le privé, sa vie était très difficile... Le 4 juin 2017, alors que je déambulais dans la foire photo de Bièvres où j'étais parti à l'improviste, je pensai soudain que j’aurais dû lui proposer la balade. Il m'avait appelé quelques semaines avant pour bavarder, me posant cette question qui était devenue existentielle pour lui : "Comment fais-tu pour habiter seul ? Ça ne t’angoisse pas d’être seul chez toi le soir ? Moi je panique." En conséquence, il prenait beaucoup de médicaments et était convaincu de ne pas pouvoir tenir sans. Mes tentatives pour le rassurer, lui vanter les innombrables avantages de ma vie de solitaire très social, le laissaient généralement perplexe ! Il était difficile à aider, je me sentais impuissant face à son mal... J’appris son suicide peu après. Lors de la cérémonie funéraire, l’organiste improvisa d’une façon aussi bruyante que dissonante, très surprenante, voire dérangeante pour beaucoup de personnes présentes, mais jubilatoire pour moi, imaginant à quel point Filippo aurait apprécié cet inquiétant tonnerre musical ! J’ai un temps cherché à en retrouver l’auteur, espérant qu’il avait enregistré sa prestation, mais sans résultat. Encore aujourd’hui, je regrette amèrement ce que je considère être une négligence de ma part. J'aurais pu et dû faire plus, j'espère avoir pris la leçon...